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1 juillet 2018 7 01 /07 /juillet /2018 11:56
Comment aimer sous le ciel gris ?

" Solitude des latitudes..."

Photographie : Alain Beauvois.

 

 

***

 

 

Comment aimer sous le ciel gris 

 

Comment arriver à l’Autre

Alors qu’on est en peine de soi

La lumière est si basse

Qui cloître les yeux

En leur énigme de verre

Le jour est si peureux

Qu’à peine un oiseau effleure

 

*

 

Vois-tu parfois le courage d’être

Nous manque et nous proférons

L’esquive

Plutôt que donner lieu

À la rencontre

Nous demeurons sous la ligne

De roches noires

En notre essentiel mutisme

Mais peut-être n’avons-nous

D’autre issue

 

*

 

Là-bas dans l’inaperçu

Sont les mouvements du monde

Leur lente palpitation

Leur syncope parfois

Le rythme de l’amour

En son éternel recommencement

Un flux reflux qui n’a de cesse

Un balancement de nycthémère

Nous disant l’immédiate fusion

Du temps

 

*

 

Au plein des terrasses

Sont les cercles blancs des jupes

Les chemises ouvertes des hommes

Les grappes mauves des glycines

Les promesses que l’on fait

Sous l’œil complice des passants

Le rose monte aux joues

Le cœur s’emballe doucement

La vie émonde ses soucis

La passion furtivement rougeoie

 

*

 

Comment aimer sous le ciel gris 

 

En cette latitude

Il est si peu de présence

Solitude nous est remise

Comme seul mot

Que nous aurons à prononcer

Dans le concert inabouti

Des choses

Tout ici dans l’impalpable

La soie est douce

Son effleurement presque un péché

Il est trop tôt ou bien trop tard

Pour ne s’accroître que de soi

Les noces sont multiples

Elles nous appellent au rivage

De la belle inconnaissance

 

*

 

Tout demeure à apprendre

Du fond même

De sa propre conscience

Du nuage où glisse le ciel

De la mare où croit la mousse

Dans sa parure d’ombre

De la mer au loin qui bat les varechs

Odeur iodée posée

Sur le revers de l’âme

 

*

 

Sais-tu toi l’Inconnue

Attablée au seuil d’une vision

Combien je suis à toi

Ne te connaissant nullement

T’espérant seulement

Quand le vent apaisé

Porte avec lui la senteur

D’une chose rare

Un cyclamen un lotus

Le dépliement d’un camélia

Précieuse tu l’es

En ta distance

En ton éloignement

Ce prodige de l’espace

Nous unit bien mieux

Que ne saurait le faire

La liaison de nos corps

Assemblés

Car alors grande serait

La tentation

De nous déchirer

Rien de plus urgent

Que la coupure

 

*

 

Les hommes n’aiment rien tant

Que l’imperceptible brume

La voile derrière l’horizon

L’anémone de mer

Que recouvre la semence de l’eau

L’écume de neige à pic du ciel

Une absence naissant d’une présence 

 

*

 

Comment aimer sous le ciel gris 

 

Toi que je devine si attentive

Que me conseilles-tu

Sauf de me taire

De faire silence

De clouer mes lèvres

Sur la gemme d’un secret

J’aurais tant aimé un signe

Peut-être une pluie de papillons

Le chant d’une cigale

Dans la touffeur de la garrigue

N’importe

Une roupie de sansonnet

Eût fait l’affaire

Le bleu d’un sentiment

Le rose d’une affliction

Le noir d’un deuil

L’éblouissant arc-en-ciel

D’une pensée

À seule condition

Qu’elle fût sincère

Libre de toute affèterie

 

*

 

Depuis le rocher où ma vie se tient

Sous la courbure grise du ciel

Je ne suis peut-être

Que ce roitelet déchu

Attendant le don d’une couronne

Viens donc belle Illusion

Avant que la nuit ne m’étreigne

Il fera si froid ici

Parmi le désordre du vent

Et les premiers frimas

Grande est la gelure

Quand l’espoir tarit

Grand le silence

Quand se taisent

Les étoiles

 

*

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