En réalité, jamais ils ne sont sortis
de la conque amniotique qui,
un jour les a abrités
dont ils ont, à leur insu,
la vibrante nostalgie.
Ils se rassurent
à coups de slogans,
ils s’élèvent,
du moins le croient-ils,
à tirer des plans sur la comète
dont ils pensent
qu’ils sont
le centre et la périphérie.
Eussent-ils fait ton inventaire
avec la délicatesse qui convient,
ils seraient alors devenus pareils
à de jeunes cabris batifolant dans les herbes,
appelant de leur voix fluette et touchante
Celle qui a été leur origine, les allaite,
veille sur eux, les protège,
leur offre abri
dès que le noroît souffle,
que s’annonce la tempête.
Tu sais bien, du fond de toi,
Fille de Vent,
que les hommes ne t’aperçoivent,
le plus souvent,
qu’au travers d’un étrange strabisme
qui, plus qu’un défaut de la vision
est défaut de l’âme
au seul motif qu’ils mêlent
en une seule et même image,
la Mère et l’Amante,
n’en percevant nullement
ce que cette double face
a de précieux,
que chaque versant
peut se dissocier de l’autre,
s’autonomiser, autrement dit
gagner cette liberté
à laquelle chacun aspire,
qui est le visage
le plus lumineux de l’être.
Mais pour quelle sombre raison,
par quelle étonnante détermination
y aurait-il incompatibilité à assumer
ces deux rôles conjointement ?
Si la femme est pure affection,
prévenance,
refuge pour ceux qu’elle aime,
elle est tout autant
être de jouissance
et de volupté.
Cessons donc de projeter
sur les choses
ce patron tout fait,
cet étalon de raison
qui fige dans la glu toute expression
alors que la palette est immense
des conduites et des comportements.
C’est bien là la richesse
de toute la condition humaine
de se vivre selon son cœur,
sa passion,
aussi bien au reste,
à l’aune de son entendement,
sous la coupe de son jugement.
Fille de Vent,
telle que tu apparais
sur la toile de l’Artiste,
tu me plais infiniment.
Libre de toi,
de tes mouvements,
de tes postures,
aussi bien les plus discrètes
que les plus sensuelles.
Ton beau corps
teinté de sanguine,
la cambrure de tes reins
qu’un jour Georges Brassens
chanta si bien,
le galbe parfait de tes fesses,
tes jambes repliées vers l’arrière
dans l’allure de la Cavalière,
de la fière Amazone,
voici tes résolutions
les plus exactes,
celles par lesquelles,
ne renonçant à rien
de qui tu es en ton fond,
tu t’assumes dans la totalité
de ton essence.
Ainsi, arrivée
au bout de toi,
à l’extrémité de la presqu’île
qui s’ouvre
sur le vaste Océan,
nous t’aimons
telle que tu es :
une exception
qui nous a été remise
comme le don
le plus précieux.
Oui,
le
plus
précieux !