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9 février 2014 7 09 /02 /février /2014 17:56

 

Petite incise sur l'instant.

 

(à partir d'un court texte de Nath Coquelicot).

 

 fleuron1

 

 

 

 Nath Coquelicot :

  "Nous étions baignés par le soleil d'hiver et partagions deux, trois et quatre cafés. Sa voix grave tambourinait mes tympans, il disait n'avoir que très peu d'amis et être bien ainsi, il n'en avait plus que deux et demi . Le demi faisait n'importe quoi et piétinait ses plates-bandes. Je l'écoutais et regardais ses yeux bleus profonds océan. D'un geste de la main, il a soulevé sa casquette et s'est frotté dans un mouvement rond et ferme le front , puis les yeux , puis les joues. Je me demandais quelles pensées il voulait écraser, ou chasser ou empêcher de s'envoler. C'était un bel instant."

 Blanc-Seing :

  L'instant, par principe, s'éclipse avant même qu'on en ait savouré le caractère éphémère, insaisissable. C'est assurément  pour cette raison qu'il ne nous en reste que quelques fragments que, plus tard, notre mémoire assemble : un morceau d'ami, un piétinement, un ébruitement dans la conque de l'oreille, des yeux-océan, des pensées-chrysalides, puis des envols infinis. Lorsque nous en faisons la synthèse a posteriori, c'est étrange, paradoxal, cet instant aussi vite effacé qu'apparu nous semble avoir pris la dimension de l'éternité.

   Mais c'est l'essence du temps que d'être si peu réductible à quoi que ce soit d'autre. Tant et si bien qu'aucune quadrature ne pourrait l'enclore dans une quelconque  volonté.  Et nous demeurons hagards, les yeux au ciel interrogeant les étoiles. Et les minutes pleuvent autour de nous, en nous, sans même que nous en sentions le subtil écoulement. La finitude se tisse de minces fils de la Vierge qui nous traversent et que nous traversons dans la lame souple du secret.  C'est simplement parce qu'un jour nous nous abreuverons à la ciguë socratique - la seule à même de nous dire notre propre vérité -, que cet instant est précieux, comme il l'était pour l'Écrivain Proust qui, dans la "Petite Madeleine", retrouvait certes un goût, une saveur, un moment précieux, mais surtout, se retrouvait lui-mêmece Petit Marcel qui, depuis ce lointain jour de l'enfance ne s'appliquait à chercher que ce "Temps perdu" auquel il a consacré sa vie entière. Sans doute, sommes-nous, tous, des Monsieur Proust qui nous ignorons.

 

  Car, écrivant ce minuscule texte et VOUS me lisant, nous ne faisons que pousser la navette temporelle afin qu'elle nous accompagne encore l'espace d'un crépuscule - le jour baisse -, d'une nuit parcourue de songes multiples, puis l'aube grise sera là, avant que ne surgisse un nouveau jour avec son soleil encore d'hiver, ses rencontres, ses conciliabules, ses espérances, ses doutes. Et, surtout ces réminiscences qui nous ont portés jusqu'à aujourd'hui, car nous ne sommes que mémoire, aussi bien du temps de notre vie que de cette inconnue d'outre-vie depuis laquelle, peut-être parvenus à une manière d'absolu, nous jonglerons avec tous ces instants comme des enfants insouciants. C'est ce que je crois. Mais, VOUS, qu'en pensez-vous ? 

 

 

 

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