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3 juin 2022 5 03 /06 /juin /2022 10:03
Posée sur sa main

Image : Léa Ciari

 

***

 

Posée sur sa main,

 

Elle demeure

En-deçà de Soi

Dans un territoire

Encore innommé

Est-elle née à ce monde

Ou bien l’hallucine-telle

Retirée qu’elle est

Dns le pli du secret 

C’est à peine

Une onde légère

C’est à peine

 Un ris de vent

A la face du lac

C’est tout juste

Un murmure

A l’orée des choses

 

Telle nous la voyons

 Telle nous l’aimons

Comme on aime

La fleur au pré

Le nuage au ciel

Le sable doux

Au rivage

 

Alanguie sur sa main,

 

Vient-elle jusqu’à nous

Nous aperçoit-elle au moins 

Nous comptons si peu

Dans l’heure qui court

Qui fuit au loin

Nulle souvenance de nous

En cette course folle

Un temps a passé

Un autre viendra

Qui nous laissera assoiffé

Au rivage du fleuve

 

Rêveuse sur sa main

 

Quel est le motif du songe

Une tâche à accomplir

Une Amie à rencontrer

Une lecture à poursuivre

Elle, l’Innommée

Est à la mi-nuit

D’elle-même

En l’ombre recueillie

Comme pour un étrange rituel

Une communion avec Soi

Le seul endroit lisible

Parmi les fabulations

De petite destinée

 

Il y a tant de secret

Tant de mystère

Et tout se mêle

Dans l’eau si fine

D’une brume

On est Soi

Là, à la lisière

De ce qui pourrait être

Mais jamais ne s’annonce

Un songe se lève et meurt

De son propre néant

 

Le visage est une jarre lisse

Un discret céladon à l’abri

Sa clarté vient à nous

Nous effleure et repart

Sans même avoir montré

La faveur de son être

 

Gauche, gauche

 Est la face

De lumière et de

Vive inquiétude

Le front est un marbre

L’œil une présence-absence

Le nez une tige frêle

L’air une fragrance infinie

La joue un signe éteint

 

Les doigts un flambeau

Il féconde la Nuit

De son éventail de résine

Nul index ne pointe

Pour nous dire

Pour lui dire

Le chemin

Å accomplir

 

Droite, droite

Est la face

En son ténébreux silence

Elle s’adoube au Rien

Et se soustrait à la vue

Ici est le domaine

De l’invisible présence

Ici est le domaine

Des pensées libres

Ici est le domaine

Des résurgences

Peut-être d’amours anciennes

Peut-être d’œuvres laissées

Au bord du chemin

Peut-être de paysages

De haute lumière

 

Nul ne sait ce

Qui, ici, fait sens

Quel langage

 En prédit la venue

Quel pinceau

En tracera l’esquisse

Quel graphite

En grisera le nom

Ô nom d’impossible venue

Tu nous laisses

Éparpillé en nous

Hagard, portrait blême

Ame errante

Au bord du vide

 

Mais pourquoi

Cette aphasie

Nos lèvres

Sont muettes

Mais pourquoi

Cette cécité

Nos yeux

 Sont plombés

Mais pourquoi

Cette hémiplégie

Notre corps est

Scindé en deux

Qui cherche

 L’autre moitié

Celle qui nous

Conduirait

 

Å l’Unité

 

Posée sur sa main

Alanguie sur sa main

Rêveuse sur sa main

 

Elle est notre

Part irrésolue

Celle par qui nous

Aurions pu exister

Mais vertical

 Est le Destin

Qui nous prive

D’une part de nous

Nous prive

D’une part d’Elle

D’ELLE qui sera

 Son seul Nom

Pour l’infini

Du Temps

 

Pour l’Infini

 

Du Temps

 

Posée sur sa main

Alanguie sur sa main

Rêveuse sur sa main

 

 

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