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30 avril 2020 4 30 /04 /avril /2020 08:17
Cette lumière qui sourdait de toi

                 Photographie : André Maynet

 

***

 

Cette lumière qui sourdait de toi

que venait-elle dire au monde ?

Etait-ce un signal

 que quelqu’un dût reconnaître ?

Etait-ce un sémaphore

qui disait, en clarté,

 ce que ne pouvait proférer

le sombre mystère du corps ?

 

A te voir, là-bas,

dans l’ornière sidérée du jour,

comment n’aurais-je été

ému aux larmes ?

 C’était si rare,

dans la dague tranchante du temps,

d’ouvrir son regard

sur quelque questionnement qui extirpât,

de la caravane ombreuse

et infinie des instants,

autre chose

qu’une affligeante banalité !

 

Car, vois-tu, La Tôt Venue

face à mon étonnement,

je te supplie de demeurer en toi,

dans cette immense réserve du dire

qui te préserve

de bien des déboires.

Sais-tu, depuis le socle où,

Déesse Antique,

 tu trônes avec la grâce

de toute chose neuve, immédiate,

sais-tu ma condition

d’éternel rêveur ?  

En es-tu la Douce Visitation

que nul ne pourrait interrompre

qu’au péril de sa vie ?

Car, sois assurée

que je tuerais volontiers,

sans l’ombre du moindre remords,

l’homme inconscient, le fou

qui te soustrairaient à mon regard.

 

Le regard.

Oui, qu’aurais-je d’autre

 à t’offrir que ceci,

 l’espace d’une attentive

contemplation

et puis me retirer

dans mon étroit

continent de silence ?

Le précieux de ta présence

s’accroît de ta pure diaphanéité,

 - tu es si transparente à toi-même ! -,

s’augmente de cette vibrante illusion

qui grésille tel l’insecte

contre le verre de la lampe.

 

Ô, dis-moi,

fière et lointaine Eurydice,

 que tu ne retourneras nullement

dans le soufre brûlant du Tartare,

 assure-moi que l’Enfer ne sera le lieu

de ton futur séjour.

Depuis ta découverte,

sur le bord du jour,

mon âme chamboulée

n’a pu trouver nul repos.

Comment pourrais-je même

en envisager le don, plus tard,

si mon existence devait ressembler

à celle du bagnard condamné à ne voir

que les parois blanches de sa geôle ?

 

Je te parle, comme je parlerais

à l’eau de la source,

à l’aile cotonneuse du nuage,

 à l’arc-en-ciel traversé de blancheur.

Existerait-il la possibilité

d’une autre alternative ?

Là, à demi allongé

sur ma couche d’effroi

et de désolation,

 je ne demeure en vie

qu’à croire en ta réalité.

Non à ton amour.

Pourrais-tu être seulement amoureuse

d’une esquisse aussi peu assurée de sa forme

que je ne le suis de ma propre venue à l’être

dans cet étroit corridor de l’existence

 qui garrote mon cou

et jette ses lianes invasives

tout autour de mes projets

sans qu’aucun, jamais,

ne trouve la voie de sa réalisation ?

 

 Rien ne m’assure

d’être vraiment.

Peut-être suis-je mort,

 ne parlant que de cet étrange outre-tombe

d’où ne s’élèvent que des voix sépulcrales

et les dernières exhalaisons

de destins qui furent

puis, un jour, rayés de la carte,

s’absentèrent à jamais.

Crois-tu que, depuis le néant

qui nous échoit à tous

un jour ou l’autre,

crois-tu qu’un brin de conscience

nous soit offert par l’Absolu

afin que nous puissions estimer

le fardeau de notre vie,

porter un jugement sur nos actes anciens,

 peser à l’aune de quelque trébuchet

la valeur de notre éthique,

la validité de nos engagements,

la puissance et l’authenticité

de notre amour ?

 

Crois-tu en ceci

qui nous sauverait

de bien des désespoirs,

notre vie après la mort

 et le lien, encore,

avec l’arbre roux de l’automne,

 le chant des cigales,

 le hululement de la Lune

dans l’esseulement du ciel ?

Crois-tu à tout ceci ?

Mais je te vois détourner la tête.

Mais je vois le pli noir de tes cheveux

qu’obombre le sublime clair-obscur,

mais je vois ton visage

que je devine blafard

- es-tu un fantôme ? -,

je vois le masque de mime

qui recouvre ton épiphanie,

est-ce pour dire

la grande fantasmagorie

de notre condition,

est-ce pour dire la difficile vérité,

 l’annuler peut-être,

elle est si difficile à atteindre,

se dissimulant, toujours,

sous des strates infinies de voiles ?

 

Mais comment donc l’écheveau

de ma lucidité

ne pourrait-il être torturé ?

 Je vois ses fils de chanvre

filer là-bas, au loin,

comme si penser dans l’exactitude

était si inimaginable

que rien, désormais,

ne pouvait avoir lieu

que cette épuisante fuite en avant,

que cette perte de soi

aux confins du monde.

Oui, notre vie est bien fragile

que frôle à chaque instant

 la fable mortelle de l’après-vie.

 

Je ne sais, vraiment,

qui je suis.

Si je suis.

Être du songe

et du fantasme,

poète sans inspiration,

chercheur d’or sans or,

magicien sans formule magique,

derviche tourneur sans robe blanche,

sans vertige d’une éternelle giration.

 

Non, je ne sais qui je suis,

alors comment pourrais-je

 te connaître,

 toi la mystérieuse qui,

tel Diogène le Cynique,

déambules en plein jour,

arborant cette étonnante lanterne

qui illumine ton flanc ?

Toi aussi, cherches-tu l’homme

tel le débauché de Sinope ?

Et ce qu’il cherchait était chose si rare :

 

 l’homme vrai, bon et sage !

 

Vois-tu, l’on ne cherche jamais

la perle rare

que parce qu’elle est rare.

Rare, précieuse, tu l’es aussi.

Telle la gemme qui brille

au creux du non-savoir.

Demeure sur la lisière

de mon songe.

Ainsi pourrais-je dire,

si le réveil se présente un jour :

 

« J’ai trouvé la femme ! »,

« J’ai trouvé la femme ! »

 

 

 

 

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commentaires

A
il fallait nous rendre a l’évidence, au seuil d une porte, là même malgré, de bon gré, se livrer au supplice de cette impuissance - nous n’etions que des hommes en situation de déshérence extrême - des livres, des siècles de pages non terminées - quand l’âge de la maturité est un naufrage - ces nuées d humanité traversant le pont des promesses - nous étions deux pays - toi le blafard, moi le mime, touchés par la grâce d’une solitude jamais avouée - que peut-on cacher à la Morale ? elle revêt ce triste paysage de conventions /conversions sociales; servant le particulier à l’idée somme toute tyrannique - <br /> <br /> Oui j’ai arrêté de t ‘écrire…oui je ne fais plus face à la réalité comme auparavant - cet avant ou il me fallait une « béquille » noire & blanche, Kodak Olympus ect…c’était ainsi un jour de janvier ou tou commence, tout fini, tout continue -…
Répondre
B
Merci Anna pour votre beau texte. Bien à vous. JPBS.

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