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7 mai 2013 2 07 /05 /mai /2013 13:38

 

Honnies soient qui mâles y pensent (7)

 

  Le repas parut long et morne à Fénelon de Najac, court et joyeux à Yvette-Charline qui, ce soir-là, était d’humeur mutine, semblant avoir bu plus que de raison, ce qui, d’habitude, la disposait un peu plus aux choses de l’amour, assertion qui se confirma dans la soirée, après les ablutions rituelles, se glissant dans le grand lit à baldaquins à demi habillée d’une nuisette de percale qui laissait deviner les timides mamelons, une demi coudée environ à l’aplomb des bretelles, la toison relativement fournie, située, à peu près trois pieds et demi au-dessus de l’ourlet de dentelle brodée par sa grand tante, tous détails habituellement affriolants, que le Comte ne vit point ou plutôt affecta de ne pas voir, pas plus qu’il ne sentit le genre de pédalage discret que tentait, en vain, sa chaste épouse, escaladant les mollets conjugaux de la pointe de ses orteils, vernissés pour l’occasion; laissant errer ses pointes de doigts sur le jabot plissé en forte toile de lin qui terminait la chemise de nuit maritale; tentant même, en désespoir de cause, et au mépris de sa pudeur naturelle, de lancer avec prudence et retenue, un doigt, l’index de la main droite, le plus expert, en direction de la fente longitudinale qui, partant de la ceinture de l’époux, descendait en direction de ses parties les plus nobles, non dans le but de les exposer à la vue, mais de favoriser leur passage lors des mictions nocturnes, sur le vase de nuit en porcelaine de Sèvres, hérité de son père, Alphonse-Bernardet, l’index, donc, au moment de s’introduire ô, après bien des hésitations et de multiples reculades, dans la fente sans doute prometteuse, du moins l’avait-elle toujours été jusqu’à ce fameux soir où le Comte, émoustillé par les histoires lubriques de son Grand-oncle, décida de couper court à l’assaut du prédateur, amorçant sur lui-même une vrille vigoureuse qui surprit l’Aimée dont l’index, pris en tenaille par le resserrement soudain de la fente de lin, subit un fort pincement, comme celui résultant du serrement de la mâchoire d’un étau, se retenant pour ne pas crier de douleur, et surtout de dépit, en entendant les ronflements de l’amant qui l’avait éconduite, ronflements, vous l’aurez deviné, qui, pour sembler réels, n’étaient que simulacres cherchant à feindre le sommeil, lequel n’était pas près de l’assaillir, tout livré qu’il était à la tyrannie du journal intime d’Eustache-Grandin, dont les phrases résonnaient dans sa boîte crânienne, laquelle faisait une sorte de bruit sado-masochiste qui l’occuperait désormais le plus clair de son temps, y compris sous les poutres de sa vénérable Librairie. Il venait, sans le savoir, de découvrir un nouveau pan de la connaissance, mais ce dernier était plus organique qu’intellectuel, se nommait "FANTASMES ", mot qu’il écrivait plus volontiers " PHANTASMES ", le « PH » initial, issu de la racine grecque, donnant aux "basses œuvres " dont il se composait, de plus nobles assises. De ce jour datèrent les insomnies du brave Fénelon de Najac qui consulta la Faculté sous les traits avenants du Médecin de famille, le Docteur Charles d’Yvetot, lequel, fort expérimenté, convoqua la science médicale la plus récente, associée aux traditionnels remèdes de " bonne femme ".

  Ainsi se succédèrent, potions, bains de pieds et de siège, saignées, suppositoires au tilleul et au houblon, Crataegus Peyotl en dilution homéopathique, préparations magistrales à base de poudre de corne de cerf et de bile de sanglier, cataplasmes d’argile verte, alternés avec ceux à la feuille de saule, frictions au vinaigre de pommes rainettes; toute la pharmacopée y passa, la française, l’espagnole, l’italienne et même celle des Pays Baltes, mais force fut de reconnaître les limites des différentes thérapeutiques et la persistance des symptômes qui étaient alimentés, primo par les phantasmes personnels de Fénelon de Lamothe, secundo par feu les fantasmes d’Eustache-Grandin qui agissaient sur les phantasmes de son petit neveu, lesquels, dans une sorte de "cercle vicieux ", s’alimentaient derechef aux fantasmes de son grand-oncle, lesquels à nouveau … , tant et si bien que le Docteur d’Yvetot cherchait la façon de s’introduire dans cette sorte d’écheveau pour y créer une rupture, mais l’écheveau n’avait plus de début ni de fin et la pathologie récente de Fénelon de Najac menaçait bientôt de se transformer en un genre de mouvement perpétuel, qui amena le représentant d’Esculape, connaissant l’amour de son patient pour les adages, la poésie et les chansons populaires, à inventer la ritournelle suivante, que son patient devait répéter ou chanter, à l’heure du coucher, en lieu et place de l’habituel comptage des moutons et autres brebis :

 

  1)  Quand du phantasme

Je vois les yeux

Morbleu

Morbleu

Je prends panique

Je prends panique

 

 

      2)  Quand du phantasme

Je vois les cheveux

Parbleu

Parbleu

Je prends mes cliques

Je prends mes cliques

 

3)  Quand du phantasme

Je vois la queue

Sacrebleu

Sacrebleu

Je lui fais la nique

Je lui fais la nique

 

4)  Quand du phantasme

Je vois les yeux

Et les cheveux

Et la queue

 

5)  Morbleu

     Parbleu

     Sacrebleu

 

6)  Je prends panique

Panique

Je prends mes cliques

Mes cliques

 

7)   Je lui fais la nique

La nique

La nique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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