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13 septembre 2023 3 13 /09 /septembre /2023 16:42
Grise inquiétude du jour

« Rive Noire II – Islande »

Michael Schlegel

 

***

 

Grise la lumière

Grise telle la traînée

de cendre.

Tout repose en soi.

Tout est au calme que

même les Hommes ne

peuvent surprendre,

eux qui sont encore

dans la douce texture

de leurs songes.

 

Eux, les Hommes, sont

dans l’inconscience d’être,

comme si, absents

à eux-mêmes,

ils flottaient dans les brumes

d’une invisible Origine.

Leurs corps sont

des champs irrévélés,

 identiques à des boules de cristal

qui traverseraient l’éther selon

les rayons d’une lumière lente,

juste un frémissement

 à l’orée du Monde.

 

Grise la lumière

Venue de si loin

qu’elle n’a plus

 la mémoire

de qui elle est.

Lumière amnésique

en quelque sorte.

Lumière pliée

au sein même

de son immobile vortex.

Rien, sur la Terre,

n’est bien assuré.

Tremblements de luciole.

 Vacuité de diatomée.

 

Le glissement de

l’aile de l’oiseau

sous la soie lisse du Ciel

serait déjà pure effraction,

déchirement de ce qui va venir,

oblitération d’un silence

qui se veut silence et

nulle autre chose.

Merveille parmi

les Merveilles

que ce temps arrêté,

que ce suspens,

un fil attache l’âme

 à ses illisibles amers.

 

Grise la lumière

Répétition de chaque

seconde devenant Éternité.

Grise griserie qui dit

le Tout de l’Homme,

le Tout de la Femme,

la beauté de l’union qui

 les fait être plus

que ce qu’ils sont,

de purs événements déposés

à la lisière de quelque

limpide pensée.

Leurs yeux scintillent

d’être qui ils sont,

de simple Nomades

en chemin vers eux-mêmes,

la seule destination qui soit.

  

Gris le Ciel au tissage de l’heure.

Le Ciel se sait

en tant que Ciel

et vogue très haut,

inattentif à toutes choses.

Le Ciel est une Royauté.

Une vastitude à lui seul

dont nul regard ne pourrait

embrasser le dôme infini,

 la courbe altière qui

ne connaît de limite.

 Être Ciel, c’est être perdu

pour les Hommes, gagné à

l’immensité seulement.

 

Alors l’Homme-Ciron

baisse les yeux

en signe d’allégeance.

Alors l’Homme ploie

sous le faix de

l’Incommensurable.

 Le Ciel est son hiéroglyphe,

le signe sous lequel il s’incline

et renonce à tout pouvoir,

 à toute possession.

 

Noire la colline qui

descend vers la mer.

Mystérieuse telle la

profondeur de la Nuit.

 Nocturne est la colline

 dont nul, encore, n’a pu

déchiffrer les ténébreux

caractères.

Terre/Ciel, des

interrogations

pour les Existants

 qui, à cette

 heure immobile

du jour, sont,

 au plus profond

d’eux-mêmes,

en leur essence,

Question de la Question.

Question, les Hommes,

de la Question du Néant,

de la Question de l’Être.

  

L’Eau. Illimitation de l’Eau.

Venue de si loin, partant si loin.

Eau dans la douce et inaperçue

mouvance du jour.

Grise-Blanche, l’Eau,

comme une hésitation à venir.

Elle vient au Présent,

mains pleines de dons et

se retire en son Passé

que nul Avenir, encore,

n’appelle à se manifester.

Eau lustrale, eau originelle.

 Un baume pour la Terre.

Une purification

pour les Hommes.

Eau qui réverbère la

douce feuille du Ciel,

 se pare de ses subtiles

transparences.

 

Eau qui bat, ici et là,

 avance et se retire,

flux et reflux,

tout ceci pareil au

rythme du Temps,

 à la généreuse

scansion de l’Amour,

à la valse à deux temps

de la Vie, de la Mort.

Balancement immémorial

qui est la mesure même de tout

ce qui vit et progresse

vers son Destin.

 

Eau inconnue en son être.

Eau porteuse de mystères.

Eau qui repousse et attire.

Eau de la fascination.

Eau de Narcisse.

Eau/Miroir en lequel chacun

croît reconnaître les lignes

 de sa fortune ou bien

de son adversité.

 

Et l’air, l’air invisible

on le connaît à sa touche discrète,

pareil au baiser de l’Amante,

pareil au jeu subtil de l’enfant

qui effeuille la vie à gestes feutrés.

L’air est discrétion, l’air est silence

et cependant on le sent si proche,

 tellement en nous,

un vent est passé

dont nous attendions

qu’il revienne,

lustre notre peau

d’une joie nouvelle.

 

Puis cet ilot, au loin,

qui dresse la herse

de ses rochers,

surgissement,

à l’horizon,

griffure qui dirait

la douleur

vacante des Hommes,

la longue attente

des Femmes

près de l’âtre

où le feu étincelle.

 

Gris

Blanc

Noir,

 

trois notes

viennent à nous

et leur modestie,

leur retrait,

nous placent face à

l’exténuante

beauté du Monde.

Exténuante, oui,

ne pas

 la reconnaître

nous plongerait

dans notre propre

abîme.

 

Grise la lumière

 

Sa douceur

Sa pureté

Le Don

Qui nous

 est fait,

L’Être

En sa

Venue.

 

 

 

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